Table des matières

Déontologie

Du grec DEO, ONTOS, devoir et LOGOS, discours. Théorie des devoirs, en morale. 1895, Code GUADET. 1941, Ordre des Architectes. 1980, nouveau code.


Règles de déontologie de l'expert judiciare

(Propositions corrigées par le Comité de réflexion le 29/11/04)

L’adhésion a une compagnie membre de la Fédération Nationale des Compagnies d’Experts Judiciaires implique l’engagement de respecter les règles de déontologie ci-après.

Les compagnies membres de la Fédération peuvent, en fonction des disciplines exercées, si elles l’estiment nécessaire, adopter des dispositions plus strictes que celles énoncées ci-après.


I. Devoirs de l'expert envers lui-même


1. L’expert adhérant à une Compagnie membre de la Fédération est une personne expérimentée dans un art, une science, une technique ou un métier, inscrite sur une des listes prévues par la loi ou les textes réglementaires, à qui le juge confie la mission de lui apporter renseignements et avis techniques nécessaires à la solution d’un litige.

L’expert inscrit sur une liste officielle ou l’expert honoraire participe, pendant l’exécution des missions qui lui sont confiées, au service public de la justice. Il a alors la qualité d’expert judiciaire.

2. L’expert inscrit sur une liste officielle n’exerce pas en cette qualité une profession mais, dans les limites de sa compétence définie, une activité répondant à la mission qu’il a reçue.

L’expert commis et ayant accepté sa mission s’engage à respecter les textes qui régissent l’activité expertale.

3. L’expert commis ne doit en aucun cas concevoir aux lieux et place des parties des travaux ou traitements, les diriger ou en surveiller l’exécution ; dans les limites de sa mission, il donne seulement son avis sur les propositions faites par les parties en vue de remédier aux causes du litige.

L’expert peut, en cas d’urgence ou de péril constaté par lui, proposer au juge que la partie concernée soit autorisée à faire exécuter, tous droits et moyens des parties réservés, sous la direction de tout technicien qualifié au choix de la partie concernée, les travaux ou traitements que celui-ci estimera utiles.

Lorsque l’expert constate un danger ou un risque, il doit en avertir la ou les parties concernée(s) dans le respect du contradictoire et sous réserve, le cas échéant, du secret professionnel. Si nécessaire, il rend compte au magistrat qui l’a commis.

4. L’expert qui a accepté une mission est tenu de la remplir jusqu’à complète exécution.

Lorsqu’il est empêché pour un motif légitime de poursuivre la mission, l’expert doit, dans les meilleurs délais, en informer le juge en précisant le motif de son empêchement.

5. L’expert est tenu d’entretenir les connaissances techniques et procédurales nécessaires au bon exercice de son activité expertale.

6. L’expert doit remplir sa mission avec impartialité. Il doit procéder avec dignité et correction en faisant abstraction de toute opinion ou appréciation subjective.

7. L’expert doit conserver une indépendance absolue, ne cédant à aucune pression ou influence, de quelque nature qu’elle soit.
Il doit s’interdire d’accepter toute mission privée de conseil ou d’arbitre, à la demande d’une ou de toutes les parties, qui fasse directement ou indirectement suite à la mission judiciaire qui lui a été confiée.
8. En matière civile lorsque, dans l’accomplissement de sa mission, l’expert se trouve confronté à une question qui échappe à sa compétence :


En matière administrative ou pénale lorsque la difficulté relève d’une spécialité distincte de la sienne, l’expert demande au juge la désignation d’une personne qualifiée.

9. L’expert rédige un rapport clair, précis et complet, comprenant une conclusion synthétique répondant à tous les points de la mission, et doit joindre en annexe tout ce qui est nécessaire à l’appréciation et à la compréhension de son rapport.
En cas de controverse doctrinale ou technique, l’expert doit en faire état et indiquer la ou les solutions qu’il retient en motivant son avis.

L’expert ne peut plus modifier le rapport déposé. Cependant, il doit signaler, dans les plus brefs délais, les erreurs matérielles commises, dans une note qui reçoit la même diffusion que le rapport lui-même.

10. L’expert remplit sa mission dans le minimum de temps compatible avec la nature de l’affaire et dans le respect du délai fixé. En cas d’impossibilité, il en réfère au juge et sollicite un délai complémentaire.

11. L’expert procède lui-même aux opérations d’expertise. Toutefois, pour certaines opérations matérielles, il peut se faire assister sous son contrôle et en sa présence par :

sauf nécessité technique et accord préalable des parties, celles-ci étant dûment convoquées pour assister aux opérations, si elles le souhaitent.
Dans ce cas leur fonction et leur identité doivent être mentionnées dans son rapport.

12. Dans les limites de la mission et sauf obligation plus stricte découlant de la déontologie propre à sa profession, l’expert n’est lié à l’égard du juge qui l’a commis par aucun secret professionnel.

Le secret expertal doit être respecté par les collaborateurs de l’expert, les assistants fussent-ils occasionnels et toute personne qu’il est amené à consulter, à charge pour lui de les en informer préalablement.

13. L’expert s’interdit toute publicité en relation avec sa qualité d’expert judiciaire. Il peut porter sur son papier à lettre et ses cartes de visite la mention de son inscription sur une liste dans les termes prévus par l’article 3 de la loi du 29 juin 1971 modifiée le 11 février 2004.

S’il appartient à une Compagnie membre de la Fédération, il peut le mentionner.


II. Devoirs de l'expert envers les magistrats et les auxiliaires de Justice


14. L’expert observe une attitude déférente envers les magistrats et courtoise à l’égard des auxiliaires de justice.

15. Il conserve toujours son entière indépendance et donne son opinion en toute conscience, sans se préoccuper des appréciations qui pourraient s’en suivre.

16. L’avis technique formulé par l’expert ne liant pas le juge le rapport peut être librement discuté et critiqué. Si l’expert est sollicité par le juge pour exposer son point de vue, il le fait en toute indépendance et s’il s’avère du débat que son avis est erroné partiellement ou en totalité, il en convient et fournit, au besoin, les éléments de fait ou d’interprétation qui en ont été la cause.

17. La nomination de l’expert appartenant souverainement au juge, l’expert doit s’abstenir de toute démarche ou proposition en vue d’obtenir des missions.


III. Devoirs de l'expert envers les parties


18. L’expert adopte une attitude correcte et courtoise à l’égard des parties.

19. L’expert doit se déporter s’il est nommé dans une affaire où l’une des parties l’a déjà consulté, et dans tous les cas où il estime ne pas être totalement indépendant ou ne pas satisfaire à l’apparence d’indépendance.

En cas de doute, l’expert fait part aux parties de l’éventuelle difficulté et se déporte si l’une au moins d’entre elles estime que la difficulté est réelle.

20. Lorsqu’une partie demande au juge, en lui fournissant toutes justifications probantes, la récusation de l’expert, celui-ci ne manifeste aucun ressentiment à l’égard de la partie qui a demandé sa récusation et s’en remet au juge, en lui faisant éventuellement part de ses observations.

21. L’expert rappelle aux parties dès le début de ses opérations le libellé de sa mission. Il procède en utilisant un langage intelligible et adapté à ses interlocuteurs. Il expose, dans la mesure du possible, le déroulement prévisible de ses opérations.

22. Sauf urgence, les parties doivent être convoquées suffisamment à temps pour leur permettre de préparer la réunion.

Si l’une des parties demande un renvoi, l’expert apprécie souverainement le motif invoqué et, en tant que de besoin, fixe aussitôt une autre date.

23. Lorsque l’expert croit devoir procéder hors la présence des parties à certaines constatations, il peut le faire, mais il se doit de leur rendre compte aussitôt après en leur faisant part des constatations faites, et enfin de le mentionner dans son rapport.

24. Si une personne consultée se refuse à fournir un document ou une information, l’expert doit en rendre compte au juge si ce fait est de nature à faire obstacle à la poursuite de la mission.

25. Sauf à tenir compte des dispositions particulières propres à certaines juridictions, ou dans les cas où le secret s’impose, l’expert respecte le principe du contradictoire et en rappelle l’obligation aux parties et à leurs conseils.

26. Si l’expert croit devoir déférer à des demandes des parties tendant à opérer une constatation ou une vérification particulière, il le fait sous la double condition que ces demandes se rattachent à la mission qu’il a reçue et qu’elles présentent une certaine utilité. Si l’expert croit ne pas devoir y donner suite et que la demande est réitérée par voie d’observations écrites, il s’en explique dans son rapport.

27. Lorsqu’il est nommé en matière civile, l’expert ne doit rien faire qui soit de nature à contrarier le désir des parties de se concilier, sans retarder pour autant le cours de ses opérations.

Le cas échéant, et après avoir vérifié que l’accord des parties couvre l’intégralité de sa mission, il en rend compte au juge.

28. Avant le dépôt de son rapport, l’expert doit faire connaître aux parties son avis en l’état, à charge pour elles de faire valoir leurs observations, auxquelles l’expert répondra dans son rapport en se limitant à sa mission. Le recours à une note de synthèse est recommandé.

29. Après le dépôt de son rapport, l’expert restitue les documents authentifiés par un cachet qui lui ont été confiés selon bordereau des parties. Il peut exiger un récépissé de cette restitution.

30. L’expert commis ne peut recevoir aucune somme ni avantage, sous quelque forme que ce soit, qui ne soient précisés dans une décision préalablement rendue ou prévue dans les textes.


IV. Devoirs de l'expert envers ses confrères


31. Lorsque plusieurs experts sont nommés en collège dans la même affaire, ils doivent opérer conjointement, sauf si la décision les commettant l’a prévu autrement.
Toutefois, lorsqu’il s’agit d’experts de spécialités différentes, ils peuvent opérer séparément s’ils le souhaitent, et si les parties l’acceptent par une déclaration commune, à condition de faire ensemble un compte rendu lors d’une prochaine réunion générale d’expertise.
L’usage, à défaut de précisions dans les textes ou la décision, est que le premier nommé dans la décision, ou le plus ancien dans l’inscription sur la liste prenne la direction des opérations.

Le rapport d’expertise est œuvre commune, mais lorsqu’un expert croit ne pas devoir se ranger à l’avis des autres, il formule son propre avis dans le rapport.

32. Dans le cas où un différend surviendrait entre deux ou plusieurs experts membres d’une même Compagnie affiliée à la Fédération, ceux-ci doivent le soumettre au Président de la Compagnie concernée qui s’efforcera de les concilier et dont ils suivront les conseils et avis.
Si le conflit survient entre membres de Compagnies différentes affiliées à la Fédération, il sera soumis aux Présidents des Compagnies concernées qui en référeront en tant que de besoin au Président de la Fédération.

33. L’expert adhérant à une Compagnie membre de la Fédération s’engage à apporter, à la demande du Président de la Compagnie dont il dépend et dans les conditions définies par celui-ci, toute assistance à l’un de ses confrères momentanément empêché, ou aux ayants droits de celui-ci sans chercher à en tirer un profit personnel.


V. Consultations privées d'experts inscrits sur les listes


Préambule :
Selon l'article 6-1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, tout citoyen a droit à un procès équitable.
Il peut donc lui être utile d’être conseillé par un expert inscrit sur une liste de juridiction, compétent techniquement et procéduralement.
Dans ce contexte, il convient de préciser les conditions selon lesquelles les experts inscrits peuvent assister techniquement des parties.

34. L’expert consulté sera tenu de donner son avis en toute liberté d ‘esprit et sans manquer à la probité ou à l’honneur.
Il évitera tout lien de dépendance économique, tout risque d’apparence de dépendance et rappellera explicitement les conditions de son intervention dans son avis.

35. L’expert adhérant à une Compagnie membre de la Fédération s’interdit d’accepter, sauf à titre tout à fait exceptionnel et hors toute notion de dépendance et de permanence, des missions de quelque nature que ce soit des organismes d’assurances agissant en tant qu’assureur.

En outre il s’engage à respecter des dispositions plus strictes de la Compagnie dont il est membre ou des juridictions dont il dépend.

36. Les experts inscrits sur les listes officielles des juridictions peuvent être appelés en consultation à titre privé dans les circonstances suivantes :


L’expert consulté se fera préciser par écrit l’état procédural de l’affaire au moment de la consultation.

37. Si aucun procès n’a été engagé ou avant toute désignation d’expert, il est recommandé à l’expert consulté de bien préciser que son avis se rapporte à l’état des choses qu’il a été amené à connaître à la date où il le donne. Cet avis doit être donné en toute objectivité et liberté d’esprit.
L’avis devra préciser la liste des pièces qui lui auront été remises.

En toute circonstance, l’expert consulté à titre privé ne peut ensuite accepter une mission judiciaire d’expertise concernant la même affaire.

38. S’il s’agit d’assister une partie alors qu’un expert a déjà été chargé d’une mission par un juge et n’a pas encore terminé de la remplir, il ne peut qu’exceptionnellement accepter de donner une consultation privée de cette nature. Dans ce cas, la consultation sera diligentée avec la volonté de répondre objectivement et dans un esprit de loyauté et de confraternité à l’égard de l’expert judiciairement commis, qu’il informera préalablement à son intervention.
L’expert consulté à titre privé doit appliquer les présentes règles de déontologie.

Le consultant privé ne peut, en l’absence de la partie et de son avocat qui l’a consulté, assister aux opérations de l’expert régulièrement désigné que s’il a justifié au préalable de son mandat.

Les observations du consultant privé ne peuvent être utilisées dans des observations écrites de la partie consultante que si elles sont produites dans leur intégralité.

39. Si l’expert judiciairement commis a déjà déposé son rapport, le consultant privé qui remet à la partie qui l’a consulté une note ou des observations écrites sur les travaux de son confrère, doit le faire dans une forme courtoise, à l’exclusion de toute critique blessante et inutile.

Il se fait confirmer par écrit par celui qui le consulte, que les documents dont il dispose avaient été au préalable produits à l’expertise judiciaire; si cependant il doit utiliser des documents nouveaux le consultant privé pourra en faire état, mais il devra faire mention de ce fait.

Les consultations privées faites dans les conditions définies ci-dessus ne doivent jamais avoir qu’un caractère exceptionnel. Il est en tout cas impératif qu’elles ne soient ni recherchées, ni sollicitées.

40. L’expert consultant se limitera à l’établissement d’un avis destiné à la partie qui l’a consulté.

Il devra, en cas de découverte de documents ou d’informations, dont l’expert judiciaire n’a pas eu connaissance, préciser leur incidence sur la solution du litige, à l’exclusion de toute critique du rapport de l’expert commis.

En cas d’erreurs matérielles relevées dans le rapport de l’expert judiciaire, ou de divergence d’appréciation, il se limitera à les exposer et à expliciter les conséquences en résultant. L’avis de l’expert consultant ne peut comporter que des appréciations techniques et scientifiques.

VI. Sanctions


41. Tout manquement aux règles de déontologie sera sanctionné par les Compagnies membres de la Fédération suivant leurs dispositions statutaires, sauf recours à la Fédération dans les conditions fixées par le Règlement Intérieur.